dimanche 20 novembre 2011

Wrong is the new right

« You're talking to someone who really understands rock music »
« I was diagnosed with clinical depression » 
 Tipper Gore


Après 18 ans de mobilisation de la scène underground, les West Memphis 3 sont enfin libres.
3 juin 1993 : trois kids de 8 ans sont retrouvés morts et mutilés à West Memphis, Arkansas. Trois adolescents – Echols, Baldwin et Misskelley - sont très vite déclarés coupables. Seule base de l’accusation : la confession incohérente d’un garçon mentalement déficient entendu sans assistance mais surtout des t-shirts heavy metal et des bouquins de Stephen King.  Aucune preuve, aucun mobile, aucune connexion sociale avec les victimes. Les avocats ont appuyé sur les cheveux longs et le kit crypto-nerd pour prouver que les trois gamins faisaient partie d’un rituel satanique. Il paraît facile de pointer du doigt un mec aux cheveux gars, habillé en cuir et qui fait une grimace acnéique pour exprimer sa perception teenager d’un satanisme cheap. A la première seconde et sans même écouter les faits, un bon paquet de rednecks qui se sont mariés à leur cousine iront dans votre sens: ce gars est coupable.







Ce qui semble être une fable puritaine teintée de McCarthyisme était aujourd’hui mis à mal par les tests ADN, un contexte moins passionné et des dizaines de vices de procédure flagrants. L’histoire s’achève sur un marché cynique : plutôt que de rouvrir l’enquête, la cour a demandé qu’ils plaident coupables et les a condamné à 18 ans de prison. Oh dudes ... bonne nouvelle, vous les avez déjà fait, vous pouvez rentrer chez vous.
Ce n’est pas la première fois que les a priori générés par la musique entraînent des injustices, mais les West Memphis 3 ont connu un soutien indéfectible de la scène indépendante. D’Henry Rollins à Ozzy Osbourne, personne n’a laissé l’oubli enterrer le scandale. « Ce que je ne peux toujours pas admettre est le fait que la police et la justice ont préféré laisser courir le vrai tueur plutôt que de reconnaître leurs torts » a déclaré Jello Biafra le jour de leur libération.
Les idées reçues entraînent le rejet, d’abord individuel puis organisé. Puis vient la censure. Dans les années 50, le rock 'n' roll arrache des cris outrés à la bonne société américaine. En 1958, la MBS, une radio américaine, élimine les disques de rock de sa programmation, prétextant qu’il s’agissait de “musique bruyante, distordue et monotone”. En 1959, le “rumble” de Link Wray est banni des stations radio même s’il est instrumental. Son seul titre encouragerait la violence adolescente. Les attaques sont virulentes et cette même année, on proclame la mort du rock. Mais le coeur triomphe toujours de la raison : la disparition de Buddy Holly et le départ à l’armée d’Elvis Presley porteront un coup beaucoup plus définitif que la censure.
 






Après les Mothers for Moral America dans les années 60 et le Movement to Restore Democracy qui accuse le rock de répandre le communisme dans les années 70, l’élection de Ronald Reagan en 1981 prépare un terrain idéal pour le plus grand organisme de censure musicale de la société moderne.
Un peu comme les 10 premières missions Apollo avant que Neil Armstrong ne fasse un pas de géant.
 





Le PMRC - Parents’ Music Resource Center - est créé en 1984 (hasard orwellien ?) après que la fille de Tipper Gore ait vu Purple Rain. Prince y chante « Darling Nikki » qui contient une allusion à la masturbation. Tipper commence alors à écouter quelques chansons de « rock » et se dit choquée. La lubie d’une femme bornée se transforme en slogan. La perversion de la musique encourage le déclin du noyau familial en Amérique : «  le rock infecte la jeunesse du monde entier. »
 





Cette association doit son succès au fait que ses membres étaient les épouses de politiciens américains, ironiquement surnommées les « Washington Wives ». Al Gore peut agiter aujourd’hui sa bannière écologiste, il a affronté Frank Zappa avec un mépris très ‘Bible Belt’. Le rôle du PMRC : engager des actions pour démontrer que les paroles des chansons sont légalement obscènes et ne sauraient donc être protégées par le premier amendement de la constitution. Ca paraît aberrant aujourd’hui, mais pendant les auditions en 1985, le second mandat de Ronald Reagan lui laisse la liberté de soutenir concrètement la droite évangélique. La Moral Majority de Jerry Falwell et l’effervescence religieuse du pays pèsent bien plus lourd que l’industrie musicale.
Il aura même fallu l’avènement du PMRC pour que Frank Zappa prenne quelque chose au sérieux. Il sera l’artiste le plus acharné contre l’association : « les requêtes du PMRC équivalent à traiter un problème de pellicules par une décapitation. »
 





 
Ah, l’interprétation technocrate d’un propos underground. Si des sénateurs hors d’âge et quelques femmes noyées dans la ferveur avaient du statuer sur les oeuvres de Picasso ou les films de Godard, ces noms évoqueraient peu de choses aujourd’hui. La Bible a 2000 ans et semble de toute façon un ouvrage de référence peu indiqué pour évaluer un disque de heavy metal.
« les gens qui rédigent de mauvaises lois sont, à mon avis, plus dangereux que des gens qui écrivent une chanson sur la sexualité. » (Frank Zappa)
Tipper reste surtout connue pour avoir collé un « Explicit Lyrics » sur les CDs. Le Tipper Sticker avait paradoxalement la réputation d’être un formidable boost pour les ventes de disques. En 1984, on s’apprête à traverser les années les plus ineptes de l’éthique musicale et il n’y a que chez les Gore qu’on est choqués par Prince ou Madonna. Les gens qui ont une vraie vie se jettent donc sur les CDs ornés d’un sticker, histoire de pimenter un peu le truc. Le phénomène atteint son sommet avec le « Cop Killer » de Body Count en 1992. Les paroles de Ice-T débordent du cache de l’autocollant, c’est un euphémisme, puisqu’il est – seul – accusé par le gouvernement de la hausse des violences contre les policiers dans le pays.




 
Le PMRC prend concrètement fin à partir de 1993 avec les mandats de Bill Clinton. Juste après les West Memphis 3. Juste après le procès de Judas Priest qui est accusé d’avoir poussé deux jeunes au suicide avec des messages subliminaux. On traverse des années où le lien est souvent obscur entre rock et politique. Censure d’un côté, opposition artistique de l’autre et on arrive toujours à ce moment où Tony Blair invite la Brit Pop à Downing Street pour s’acheter une youth credibility.
La Tipper Gore française tient le même discours avec 25 ans de retard (discours qui à l’origine en avait déjà facile 150 dans la remorque). Le cheval de bataille de Christine Boutin, c’est le Hellfest. « Anti-chrétien », « musique du diable », « culture de la mort » ... Euh bon, Hammerfall tourne un clip pour l’équipe de Suède de Curling et Kiss vend des jouets aux enfants. C’est d’ailleurs doublement ironique que le Hellfest sonne comme un revival du heavy metal 80s et qu’on assiste en parallèle à ce revival du PMRC avec les interventions de l’ex-ministre.
Les mecs qui dézinguent leurs potes dans les lycées américains écoutent quoi au juste ? Et les braqueurs de banque ? Les traders ? Les emplois fictifs ? Qu’est ce qu’écoutent Tipper Gore et Christine Boutin ? Hey, les Beatles m’ont l’air beaucoup plus dangereux que Pantera.




Photo tirée des archives insolites des caméras du Walmart (USA)



La censure a gagné dans le sens où la provocation marketée et formatée a pris une posture vide et superficielle. Pendant que Christine Boutin leur tape dessus, AC/DC chante son amour inoffensif de la bière pendant que Katy Perry et Lady Gaga choquent le haut des charts et quelques grand-mères.

Article publié dans Abus Dangereux # 120 

dimanche 6 novembre 2011

This machine kills fake-ists

Preview de concert parue dans Clubs & Concerts # 46 // novembre 2011 

"I'll never try to put on a fake image. I'm just Zac."  // Zac Efron





“I don't mean to sound bitter, cold, or cruel, but I am, so that's how it comes out.” // Bill Hicks

dimanche 16 octobre 2011

the MELVINS


Interview des Melvins publiée dans Abus Dangereux # 120  // Octobre 2011
Des blagues tordues,  un duo à la télépathie antonyme : une interview avec Dale Crover et Buzz Osborne est un truc comme regarder Freaks et Clerks simultanément, tout en écoutant un 45 tours de Daniel Johnson à travers le ralenti du 33 tours. Un abattage disques-concerts qui force le respect et presque trente ans de carrière sans jamais mettre en cause leur intégrité. Rencontre au Hellfest avant qu’ils donnent le meilleur concert du festival. Dale et Buzz parlent de l’étiquette musicale du groupe, de pochettes « Violent Kitty », de Kiss et de leur 10e album live sorti cet été, « Sugar Daddy Live ». Et tout ça sans évoquer Kurt Cobain.


2011 a été une année terrible pour vous. Vous étiez au Japon pendant le tsunami ...
Buzz : ... et en Nouvelle-Zélande pendant le tremblement de terre.
Dale : Ouais, c’est plutôt moche.
Que pensez-vous qu’il va se passer pendant ce festival ?
Buzz : Tout le monde va mourir. Des vagues, des explosions, la Terre va s’ouvrir sous nos pieds.
Dale : Mais si on s’en tient au passé proche, nous on sera partis quand ça arrivera.
Buzz : Oui dès qu’on va partir. Le troisième jour va être une catastrophe. Pendant qu’Ozzy joue, ce serait plutôt cool.
Dale : Touchons du bois tant qu’il y en a encore. (blik blik)
Buzz : Oops, touchons du faux bois.
Vous venez de sortir « Sugar Daddy Live ». Ce titre, c’est un moyen de dire que vous n’êtes plus très jeunes ?
Buzz : Bien sûr. Je pensais bien que ça arriverait mais il faut se faire une raison. « I’ll be your daddy, your sugar daddy ».  Je pensais que ce serait un nom vraiment cool pour un disque. J’étais persuadé que quelqu’un l’avait déjà utilisé, mais j’ai cherché et je me suis aperçu qu’en fait, pas du tout.
Vous tenez un genre de listes pour les titres potentiels ?
Buzz : Oui, j’ai une liste. Sugar Daddy était sur la liste. Comment aurait-il pu en être autrement ?
Il y a une version très personnelle de ‘Star Spangled Banner’ sur le live. C’était un hommage à Hendrix ? (NdR : la chanson est une vague tentative vocale de restituer l’hymne US)
Buzz : Oh ... ouais ... bien sûr. C’est complètement à cause de notre amour dévoué pour Jimi Hendrix. Complètement. C’est d’ailleurs purement une reprise de Jimi Hendrix. Nous ne savions pas à l’époque qu’il y avait un quelconque rapport avec les Etats Unis.
Dale : Jimi s’était occupé de la guitare, on s’est chargés du chant.

C’est comme le Patriot Act des Melvins.
Buzz : Tellement qu’on aurait aimé qu’on nous demande de chanter pour un match de base-ball.



Photo Hellfest @ Louise Dehaye
 
Vous avez enregistré le live dans un club.
Dale : Oui, un comedy club au sud de Los Angeles, dans un bled qui s’appelle Dunley.
Pourquoi vous avez choisi ce type d’endroit pour enregistrer ce live ?
Dale : Il y a en général une très bonne acoustique dans les comedy clubs.
Buzz : On a en fait enregistré pas mal de shows sur cette tournée, mais on pensait que celui-là faisait partie de ceux qui sonnaient le mieux. C’était vraiment une coïncidence, on n’a pas vraiment tenu compte des salles.
Vous êtes en fait des workaholiques déguisés en slackers.
Buzz : Oui complètement. Je suis très obsessionnel. A tous les sujets. Je viens toujours avec un paquet d’idées, des trucs que j’ai envie de faire. Récemment, on a du bosser sur des packages fait à la main, préparer le box set... sans compter toutes ces choses qui ralentissent le travail. Il y en a de plus en plus. Tu sais que Dale et moi, on a fait plus de 2000 shows. C’est beaucoup.







Buzz, ta femme Mackie s’occupe de l’artwork des albums. C’est important pour vous de garder une cohérence visuelle d’un album à l’autre ?
Buzz : Tu vois les affiches ici ? (NdR : le box est « décoré » de promo de Dagoba et Doro) C’est exactement le genre d’artwork qu’on ne veut pas. Je ne veux rien avoir à faire avec un truc qui ressemble à ça. On veut quelque chose qui soit différent. Beaucoup des visuels qu’on choisit sont de la « cute violence ». Ca me semble être une bonne définition. La version violente d’Hello Kitty., C’est vendeur, la violence. Ces affiches, là, ça ne veut rien dire, c’est stupide. Ces gars ne sont pas vraiment méchants ou diaboliques. Ils passent plus de temps à se coiffer qu’à faire les gros bras. J’aime un sacré paquet de trucs différents et ça me ferait mal d’être résumé à un genre minuscule. Déjà, notre nom, les Melvins, c’est un peu comme les Ramones. Nos pochettes ne reflètent pas notre musique. Notre maison de disques ne s’attend pas à ce que nous vendions des tonnes d’albums. Bon ces mecs là, c’est ok, ils font leur truc et ce n’est pas pour moi. On dirait un mauvais film exotique. Je ne connais même pas la plupart de ces groupes, je parle juste en terme d’imagerie. Tu connais cet artiste des années 70, Boris Vallejo? C’est un peintre. Il fait pas mal de trucs dans ce genre. Il fait beaucoup d’illustrations pour les nouvelles de Burroughs. Pas vraiment le poète beat, hein. Le gars de Tarzan, Edgar Rice Burroughs.
 





Et paradoxalement, vous êtes des gros fans de Kiss.
Buzz : J’aime quelques disques ouais, les vieux trucs.  L’album « Hotter than Hell » est vraiment bon.
Dale : « Alive ! » est cool aussi.
Et vous avez fait pas mal de reprises : quelle est votre chanson préférée ?
Dale : « She ». 
 Buzz : « Strange Ways ».  Je pense que c’est un des meilleurs solos de l’histoire. C’est en tout cas le meilleur solo d’Ace Frehley. Bizarrement, ils n’ont pas tant de grandes chansons. T’as quelques morceaux qui sont terribles, « Detroit Rock City » est une chanson géniale. « God of Thunder ». De bonnes chansons, bien jouées, un bon songwriting. 


Comment est-ce que vous percevez le fait que personne ne trouve d’étiquette pour votre musique. Vous êtes juste « indie » pour tout le monde. Comment vous appelleriez votre propre style ?
Dale : Je ne suis pas sûr qu’on soit un groupe grunge ... il faudrait rajouter du heavy metal, du punk ... les étiquettes sont surtout pour les gens qui ne s’y connaissent pas trop en musique, histoire de ne pas se perdre dans les magasins de disque. Pour ces gens, notre étiquette serait « euh, probablement quelque chose que vous n’aimeriez pas ».
Buzz : Je dirais « Captain Beefheart qui joue du heavy metal ».
Ca sonne violent.
Buzz : Oui, ce le serait très assurément. Une combinaison de Miles Davis qui joue Funkadelic, George Clinton et Captain Beefheart qui jouent du métal. Tous en même temps. C’est ce que j’essaie de faire.
Quel était le plan pour les Melvins en 1983, quand vous avez commencé ?
Buzz : Jouer un concert.
Dale : ... et on en a joué plus de 2000 comme on te disait.
Buzz : c’était notre seul but à l’époque. Avec celui de créer de la musique qu’on aimerait en tant que fans. On croit que c’est le seul moyen de faire de la musique. Beaucoup de gens partent en se disant : « quel genre de musique va plaire au public ? ». Mais si toi tu n’aimes pas, ça ne peut pas marcher. Hey, j’ai bon goût. Alors si j’aime un truc, d’autres gens vont l’aimer aussi. Pas le monde entier bien sûr puisque les disques qui se vendent sont surtout des trucs atroces, et 99 % du public mainstream n’aimerait pas ce que nous faisons. Je suis un weirdo excentrique. Mes idées sont rarement prises au sérieux par le reste du monde, je ne sais pas pourquoi.
Vous n’en avez pas marre d’être incompris ?
Buzz : On s’y est fait.
Dale : Pour des raisons qui restent floues, ce n’est pas si difficile d’embrouiller les gens. Je ne sais pas pourquoi.
Buzz : Ca me surprend toujours quand les gens ne nous aiment pas, et finalement changent d’avis. « Je ne vous comprenais pas, mais hey maintenant c’est plutôt cool ce que vous faites ». Ce que j’entends c’est « j’ai toujours été très stupide mais maintenant je pense que je suis devenu un peu plus malin. »  Mais pourquoi tu viens me dire ce genre de truc ? Je m’en tamponne carrément. « Hey, je pense que tes peintures sont horribles mais les nouvelles tiennent la route. » Je me vois mal dire ça à quelqu’un.
Dale : Bah. La plupart de mes disques préférés, je ne les ai pas aimé au départ. Tu ne comprends pas le truc et ça prend un certain temps de t’approprier les morceaux. 


Est-ce qu’il y a un challenge dans les Melvins, du genre à jouer la chanson la plus heavy, lente et sludge de l’histoire ?
Buzz : Rien de ce style non. A vrai dire, on veut seulement écrire ce qu’on considère comme étant de bonnes chansons. Pas forcément dans le style d’écriture habituel depuis Chuck Berry. Couplet – refrain – couplet –refrain – refrain. Je ne trouve pas ça intéressant. Je remercie Chuck Berry, mais c’était dans les années 50 ! Même les Beatles prenaient plus de risques que la plupart des groupes actuels.
Dale : Ouais, carrément vrai. Pour de la pop, ils avaient pris un chemin loin d’être traditionnel.
Buzz : Les structures surtout. Une chanson comme « Happiness is a warm gun » est vraiment étrange. Aucun thème ne se répète, la chanson évolue. Et c’était dans les années 60 ! Si tu ne prends que les groupes sur le Warp Tour, tout le monde joue le même truc. Couplet refrain couplet refrain poOOOoont ... refrain refrain terminé. Chuck Berry !! Ca ne m’intéresse pas du tout et je doute que ça intéresse nos fans.
Vous avez des astuces pour éviter des redites ?
Buzz : Utiliser sa tête. Je ne jouerais simplement pas une musique que je n’aime pas. C’est la seule constante.
Pour vous, quel est la chanson la plus Melvins de votre répertoire ?
Dale : Hey, c’est plutôt dur à dire. On vient de tourner aux Etats-Unis en jouant nos vieux disques.  Je pense toujours que ce sont de bonnes chansons, d’un type différent. Pour moi, ça sonne plutôt bien encore aujourd’hui.
Buzz : Je ne pourrais pas choisir une chanson. Je pourrais te donner peut-être cinq albums.

Photo Hellfest @ Louise Dehaye


DOD avait sorti une pédale d’effet de guitare – la BuzzBox. C’était un peu tombé à plat. C’était censé imiter ton son, Buzz.
Buzz : je n’ai vraiment rien à voir avec le truc. Ils ont juste voulu imiter mon son sur le disque Eggnog. Une idée un peu tordue.
Quel est ton vrai matériel sur scène ?
Buzz : Plus les années passent, en tant qu’individu et en tant que guitariste, moins je fais attention au matériel et je deviens plus attentif aux guitaristes. Si tu donnes à Hendrix les pires amplis et guitares au monde et que tu me donnes à moi les meilleurs, il sera encore meilleur. Ne faites pas trop gaffe au matos les mecs. C’est un détail. Ca a plus à voir avec ce qui est dans ton coeur et dans ta tête. Hendrix aurait été bon quoiqu’il arrive. Tu ne peux pas compter sur la technologie pour dérouter les gens du fait que tu es un piètre guitariste. Les chansons restent les chansons. Elles sont bonnes même si elles sont enregistrées sur un 4-pistes ou avec un dictaphone.
Sugar daddy Live (Ipecac / Differ-ant)
 

 



mardi 27 septembre 2011

Munster of Rock


Eté 2011. Pendant que certains ne quittent pas la côte atlantique ou écoutent en boucle le tube de l’été au coin d’un cocktail, nous on est partis à la foire aux vins de Colmar voir Judas Priest. Le principe est simple. Tu peux acheter un salon de jardin, boire du vin de producteur, manger un bretzel et voir un concert de métal en dix minutes chrono.
J’étais en fait parti pour ne poster aucun live-report, mais ça aurait été tirer un trait sur cette photo, un instant classic capté pendant la conférence de presse d’Apocalyptica.

Bretzalyptica @ Louise Dehaye

La Foire a voulu être hyper restrictive sur les accréditations et sur place, tout est à peu près interdit comme si les journalistes étaient présumés coupables. C’est donc étonnant de cotoyer des blogueurs un peu largués, fans avant tout et qui transforment les conférences de presse en ressources wikipedia.
Une conférence de presse un peu extra-terrestre, avec un mec en total look cuir/ boucle de ceinture British Steel et t-shirt 'Halford' … peu d’intérêt et le groupe l'a vite compris. Quand il y a eu un flottement en fin d’interview, les mecs ont oublié qu’ils avaient 60 ans et ont bondi de leur siège dans le plus pur style Usain Bolt. Et puis il y a un côté amer à poser des questions à Judas Priest devant une toile qui liste les invités de toute la semaine. Demander à Rob Halford à quel point il est cool avec d’énormes inscriptions Yannick Noah et Eddy Mitchell derrière lui, c’est un peu comme ces jeux TV où on doit rester concentré alors qu’un mec te hurle des insanités dans l’oreille.




Ma préférence était allée à cette question :
Vous jouez 2h15 ce soir, ce qui est la durée exacte de votre show au Graspop. Est-ce que vous allez jouer exactement le même set ?
Je suis assez partisan du fait de dire que certaines choses nous apparaissent stupides à mesure qu’on les prononce. Ce mec n’était apparemment pas équipé du même instinct de survie.
Je suis passé jeter un coup d’œil à Sepultura.Il n’y a plus qu’Andreas Kisser et le seul survivant depuis le début, le bassiste Paulo Xisto. Je les avais vu en 1996 en première partie d’AC/DC, sur la tournée Roots. Je n’ai jamais été fan mais c’était vraiment un autre groupe.C’était massif et carré à en oublier de déglutir. La version actuelle n’a pas ce problème, pour aller directement au but. On dirait un groupe de reprise sur lequel la nostalgie n’aurait plus de prise salvatrice.


Andreas Kisser @ Louise Dehaye








Judas Priest joue sa dernière tournée avant de se consacrer au studio. Une démarche très honnête pour éviter de flouer les fans dans des concerts rentables mais un peu pathétiques comme Ozzy. La fibre ouvrière de Birmingham ne triche pas. Dans les Midlands on conçoit le rock comme Charlie Chaplin serre des écrous dans les Temps Modernes. Même Rob Halford, après 30 ans de soleil américain n’a pas perdu son accent épais de West Bromwich. British Steel, inaltérable.
Scream for me ...Colmar !
Un show intelligent et généreux. La scène est barrée d’une toile « Epitaph », symbole du Farewell tour et aveu intimiste que leur carrière est proche de la fin. La musique d’intro est donc admirablement choisie, avec ‘War Pigs’ de Black Sabbath. Une façon de se souvenir des premiers jours, quand Birmingham était le berceau du metal et que les deux groupes écumaient les clubs de Birmingham au début des 70s.



Près de deux heures et demi de show, et peu de passages à vide. Une énorme générosité et pas mal de connivence avec son public. Le très mauvais passage est la chanson « Nostradamus » de l’album du même nom. Si on m’offrait un voyage dans le temps, j’hésiterais entre sauver JFK, revoir mon chien Youpi, jouer du Chuck Berry au Bal des Sirènes et voler les bandes ce de disque avant sa sortie. Ce que je finirais probablement par faire. Un album épouvantable. Le meilleur passage a été la version karaoké de « Breaking the Law » qui a eu un succès extraordinaire. Ca a aussi permis d’écouter la section rythmique sans que Rob Halford capte notre attention, et c’est quand même un étalon tellurique.



Une salle parfaite pour un concert. Dans le style des Arenas US des 70s avec les ¾ des gens assis, mais des escaliers très larges où les kids peuvent se défouler comme dans un teen movie. Des mecs passent dans les travées avec des cartons de pintes de bière. Heavy Metal Parking Lot ... for real.

mardi 20 septembre 2011

Where there's a sea, there are pirates

On le sait, les maisons de disque s'accrochent à leur modèle pré-internet, un truc un peu scandaleux de ce côté-ci de la platine. D’un côté elles ne veulent pas s’adapter, d’un autre les gens mettent les labels indépendants dans le même sac : bref, c’est le bordel.


Ces jours-ci, plusieurs infos sur le même sujet m’ont interpellé.


D’abord cet extrait du Figaro magazine :




On trouve régulièrement ce genre de papier commandé par l’industrie du disque. Ca a été tour à tour un financement pour le terrorisme, la cause du montant des fournisseurs internet ... bla bla. Un remède unique à ça ? Payer un CD 18 €, et aussi sa génération remasterisée, puis celle sortie pour l’anniversaire du bordel avec deux titres abandonnés depuis toujours en bonus. Quoi ? Vous trouvez ça cher ? Ah mais c’est parce que ça aussi c’est de la faute des pirates.

Le 18 août dernier, une tempête d'une grande violence a fait 5 morts, 70 blessés et des dizaines de personnes choquées ainsi que de gros dégâts matériels pendant le Pukkelpop, ce festival très cool à l’est de la Belgique. Quinze minutes, l’enfer sur Terre et la désolation après 25 ans de franche réussite.

C’est donc de la faute de ces apôtres du diable dans le public. On oublie de dire qu’on paye toujours les CDs aussi cher, mais que maintenant, les concerts aussi se payent à prix d’or. A moins que ces gens au Pukkelpop aient téléchargé des tickets ou qu’un mec ait hacké la météo, je ne vois pas en quoi ils seraient coupables.





Pendant ce temps, et contre tout bon sens démocratique, le Parti Pirate allemand a remporté ses premiers sièges au parlement de Berlin avec 8,9 % des voix.

Fondé en 2006 en Suède par des activistes proches du site de téléchargement illégal The Pirate Bay, le Parti pirate défend les droits des internautes, milite pour la transparence des gouvernements, et prône une réforme radicale du droit d'auteur, incluant notamment la dépénalisation du téléchargement dans le cadre familial et une refonte du système des brevets. Le programme prévoit également la création d'un salaire minimum, la légalisation de la marijuana ou la fin des amendes dans les transports publics – rappellent que le parti Vert a également débuté comme un mouvement de contestation avant de devenir l'une des principales forces politiques allemandes.


(source : Le Monde )





Enfin, en marge d’un article que j’écris sur la censure, j’ai appris la proposition de loi en ... 1985, pour une Blank Tape Tax aux Etats-Unis. L’industrie était en effet inquiète car les kids copiaient les albums sur des cassettes. Un grand débat avait été lancé sur l’enregistrement pirate des disques et la RIAA demandait une taxe conséquente sur les cassettes vierges. Le débat s'est fait aplatir par la montée fulgurante du PMRC (l’association réactio-chrétienne de Tipper Gore, la femme du sénateur Al Gore, à qui on doit le sticker « Explicit Lyrics ») et n’a pas été étudié en profondeur


Les interférences entre l'underground et la technocratie font toujours de bonnes histoires.


"Most people wouldn't know music if it came up and bit them on the ass." - Frank Zappa