mardi 27 septembre 2011

Munster of Rock


Eté 2011. Pendant que certains ne quittent pas la côte atlantique ou écoutent en boucle le tube de l’été au coin d’un cocktail, nous on est partis à la foire aux vins de Colmar voir Judas Priest. Le principe est simple. Tu peux acheter un salon de jardin, boire du vin de producteur, manger un bretzel et voir un concert de métal en dix minutes chrono.
J’étais en fait parti pour ne poster aucun live-report, mais ça aurait été tirer un trait sur cette photo, un instant classic capté pendant la conférence de presse d’Apocalyptica.

Bretzalyptica @ Louise Dehaye

La Foire a voulu être hyper restrictive sur les accréditations et sur place, tout est à peu près interdit comme si les journalistes étaient présumés coupables. C’est donc étonnant de cotoyer des blogueurs un peu largués, fans avant tout et qui transforment les conférences de presse en ressources wikipedia.
Une conférence de presse un peu extra-terrestre, avec un mec en total look cuir/ boucle de ceinture British Steel et t-shirt 'Halford' … peu d’intérêt et le groupe l'a vite compris. Quand il y a eu un flottement en fin d’interview, les mecs ont oublié qu’ils avaient 60 ans et ont bondi de leur siège dans le plus pur style Usain Bolt. Et puis il y a un côté amer à poser des questions à Judas Priest devant une toile qui liste les invités de toute la semaine. Demander à Rob Halford à quel point il est cool avec d’énormes inscriptions Yannick Noah et Eddy Mitchell derrière lui, c’est un peu comme ces jeux TV où on doit rester concentré alors qu’un mec te hurle des insanités dans l’oreille.




Ma préférence était allée à cette question :
Vous jouez 2h15 ce soir, ce qui est la durée exacte de votre show au Graspop. Est-ce que vous allez jouer exactement le même set ?
Je suis assez partisan du fait de dire que certaines choses nous apparaissent stupides à mesure qu’on les prononce. Ce mec n’était apparemment pas équipé du même instinct de survie.
Je suis passé jeter un coup d’œil à Sepultura.Il n’y a plus qu’Andreas Kisser et le seul survivant depuis le début, le bassiste Paulo Xisto. Je les avais vu en 1996 en première partie d’AC/DC, sur la tournée Roots. Je n’ai jamais été fan mais c’était vraiment un autre groupe.C’était massif et carré à en oublier de déglutir. La version actuelle n’a pas ce problème, pour aller directement au but. On dirait un groupe de reprise sur lequel la nostalgie n’aurait plus de prise salvatrice.


Andreas Kisser @ Louise Dehaye








Judas Priest joue sa dernière tournée avant de se consacrer au studio. Une démarche très honnête pour éviter de flouer les fans dans des concerts rentables mais un peu pathétiques comme Ozzy. La fibre ouvrière de Birmingham ne triche pas. Dans les Midlands on conçoit le rock comme Charlie Chaplin serre des écrous dans les Temps Modernes. Même Rob Halford, après 30 ans de soleil américain n’a pas perdu son accent épais de West Bromwich. British Steel, inaltérable.
Scream for me ...Colmar !
Un show intelligent et généreux. La scène est barrée d’une toile « Epitaph », symbole du Farewell tour et aveu intimiste que leur carrière est proche de la fin. La musique d’intro est donc admirablement choisie, avec ‘War Pigs’ de Black Sabbath. Une façon de se souvenir des premiers jours, quand Birmingham était le berceau du metal et que les deux groupes écumaient les clubs de Birmingham au début des 70s.



Près de deux heures et demi de show, et peu de passages à vide. Une énorme générosité et pas mal de connivence avec son public. Le très mauvais passage est la chanson « Nostradamus » de l’album du même nom. Si on m’offrait un voyage dans le temps, j’hésiterais entre sauver JFK, revoir mon chien Youpi, jouer du Chuck Berry au Bal des Sirènes et voler les bandes ce de disque avant sa sortie. Ce que je finirais probablement par faire. Un album épouvantable. Le meilleur passage a été la version karaoké de « Breaking the Law » qui a eu un succès extraordinaire. Ca a aussi permis d’écouter la section rythmique sans que Rob Halford capte notre attention, et c’est quand même un étalon tellurique.



Une salle parfaite pour un concert. Dans le style des Arenas US des 70s avec les ¾ des gens assis, mais des escaliers très larges où les kids peuvent se défouler comme dans un teen movie. Des mecs passent dans les travées avec des cartons de pintes de bière. Heavy Metal Parking Lot ... for real.

mardi 20 septembre 2011

Where there's a sea, there are pirates

On le sait, les maisons de disque s'accrochent à leur modèle pré-internet, un truc un peu scandaleux de ce côté-ci de la platine. D’un côté elles ne veulent pas s’adapter, d’un autre les gens mettent les labels indépendants dans le même sac : bref, c’est le bordel.


Ces jours-ci, plusieurs infos sur le même sujet m’ont interpellé.


D’abord cet extrait du Figaro magazine :




On trouve régulièrement ce genre de papier commandé par l’industrie du disque. Ca a été tour à tour un financement pour le terrorisme, la cause du montant des fournisseurs internet ... bla bla. Un remède unique à ça ? Payer un CD 18 €, et aussi sa génération remasterisée, puis celle sortie pour l’anniversaire du bordel avec deux titres abandonnés depuis toujours en bonus. Quoi ? Vous trouvez ça cher ? Ah mais c’est parce que ça aussi c’est de la faute des pirates.

Le 18 août dernier, une tempête d'une grande violence a fait 5 morts, 70 blessés et des dizaines de personnes choquées ainsi que de gros dégâts matériels pendant le Pukkelpop, ce festival très cool à l’est de la Belgique. Quinze minutes, l’enfer sur Terre et la désolation après 25 ans de franche réussite.

C’est donc de la faute de ces apôtres du diable dans le public. On oublie de dire qu’on paye toujours les CDs aussi cher, mais que maintenant, les concerts aussi se payent à prix d’or. A moins que ces gens au Pukkelpop aient téléchargé des tickets ou qu’un mec ait hacké la météo, je ne vois pas en quoi ils seraient coupables.





Pendant ce temps, et contre tout bon sens démocratique, le Parti Pirate allemand a remporté ses premiers sièges au parlement de Berlin avec 8,9 % des voix.

Fondé en 2006 en Suède par des activistes proches du site de téléchargement illégal The Pirate Bay, le Parti pirate défend les droits des internautes, milite pour la transparence des gouvernements, et prône une réforme radicale du droit d'auteur, incluant notamment la dépénalisation du téléchargement dans le cadre familial et une refonte du système des brevets. Le programme prévoit également la création d'un salaire minimum, la légalisation de la marijuana ou la fin des amendes dans les transports publics – rappellent que le parti Vert a également débuté comme un mouvement de contestation avant de devenir l'une des principales forces politiques allemandes.


(source : Le Monde )





Enfin, en marge d’un article que j’écris sur la censure, j’ai appris la proposition de loi en ... 1985, pour une Blank Tape Tax aux Etats-Unis. L’industrie était en effet inquiète car les kids copiaient les albums sur des cassettes. Un grand débat avait été lancé sur l’enregistrement pirate des disques et la RIAA demandait une taxe conséquente sur les cassettes vierges. Le débat s'est fait aplatir par la montée fulgurante du PMRC (l’association réactio-chrétienne de Tipper Gore, la femme du sénateur Al Gore, à qui on doit le sticker « Explicit Lyrics ») et n’a pas été étudié en profondeur


Les interférences entre l'underground et la technocratie font toujours de bonnes histoires.


"Most people wouldn't know music if it came up and bit them on the ass." - Frank Zappa

Join the Underground Army !


Va chercher ton transistor au grenier. On reprend GOING UNDERGROUND tous les mardis à 19 h sur Radio Campus Bordeaux 88.1. Podcast en ligne dès le mercredi matin pour ceux qui n'ont pas de grenier.


Comme la Terre entière a toujours une fenêtre Facebook ouverte sur son écran, les nouveaux podcasts sont signalés sur notre page du flux Zuckerberg:

>>> La page Going Underground sur Facebook

mardi 13 septembre 2011

« Edna, j’ai un problème avec le Zombi-matique »

Chronique parue dans le fanzine BAD IDEAS # 5 // Septembre 2011

Un tas de gars qui ont grandi en même temps que le jeu vidéo (dude, je jouais à Pac Man et Space Invaders dans les troquets quand j’étais un kid) ont arrêté d’y jouer quand la forme a empiété sur le fond. La suite a prouvé que mon cerveau n’était de toute façon pas fait pour encaisser toute donnée excédant le 16-bits.




En 1991, ma mère m’a acheté un Atari ST pour ... m’aider à l’école. Tout ce que j’ai fait sur cet ordinateur, c’était de jouer frénétiquement à deux jeux qui sont restés dans mon top 5 jusqu’ici. Zak McKracken et Maniac Mansion. Les deux étaient conçus par LucasFilm Games (de nombreuses références cachées dans ces jeux à propos de Star Wars ou THX 1138, d’ailleurs) et les deux étaient des jeux « point and click ». Concrètement, il fallait indiquer quoi faire au personnage en cliquant sur des actions et des objets. Un trip jeu de rôles pour nerds pop corn. Ok, c’était loin de la 3D, mais ce n’était pas une limitation technique dépressive du genre « c’est horrible que nous soyons si frustrés car on aimerait tant que des raccourcis claviers servent une action 3D super fluide avec des personnages réalistes ». Non, la forme était assumée et conférait tout le charme au truc. C’est un peu comme si tu compares Michel Gondry et Michael Mann, ok ? Cette posture fait d’ailleurs que c’est encore jouable aujourd’hui. De la même façon que tu préfères la première version de Star Wars à la version remasterisée ou que tu regardes encore Blade Runner sans hurler.

« Bernard ! Don’t be Tuna-head ! »

Maniac Mansion est arrivé dans un contexte particulier. Les films d’horreur étaient au top, Elvira avait son émission US hebdomadaire, le rock indé remplaçait la vague synthé-dégueulasse et débouchait sur le grunge. Ce jeu était un prolongement de tout ça. Je ne vais pas dire que Maniac Mansion était un jeu grunge mais c’était en tout cas le chainon manquant entre la Hammer et Wayne’s World ... exprimé à travers une batterie 8-bits.

Il faut botter en touche le côté retro-gamer. J’adore ce jeu car il est cool, pas parce qu’il est vieux. En 2011 finalement, l’âge des remakes et des adaptations, on a régressé dans l’ambition. Maniac Mansion est né en plein milieu de ces années où la créativité n’avait pas de barrières.



Un teenager essaye de sauver sa copine au nom incroyable (Sandy Pantz) d’un savant fou contrôlé par une entité extraterrestre. Des potes largués dans un manoir vaguement gore, des aliens, une copine pot de fleur qui a tout de la screameuse du film d’horreur 80s. L’ambition de Dr Fred : dominer le monde, un teenager après l’autre. Intéressant quand on sait que son réacteur nucléaire est relié à un disjoncteur. Le parfum B-movies renifle le Rocky Horror Picture Show. A vrai dire, le truc ressemble au film ultime pour le duo Robert Zemeckis/ Ed Wood. Un teen movie, et pour à la fois le dire sobrement et classer le phénomène, c’était mieux que les Goonies les mecs.



Ajoutons à ça des détails complètement désuets et donc foncièrement attachants. Les dialogues des cinématiques sonnent aussi cheap que toute la vidéothèque de Joe Dante. « Allez vous faire cuire un oeuf avec votre maudit météore », « je n’arriverai jamais à monter un groupe. Ma vie ne rime à rien », « Papa m’inquiète avec son projet secret dans le laboratoire, ça fait cinq ans qu’il n’a pas dormi » ... Et puis dans quel genre de jeu on peut mettre un hamster au micro-ondes et aller chercher un code secret dans les hi-scores d’une borne d’arcades ?

Le point fort du jeu était aussi la musique. Chaque perso a sa bande-son. Celle de Razor notamment est très innovante à l’époque. Je pense que les gens qui ont créé l’electro-punk ont joué à ce truc.

«Pourquoi y a-t-il une tronçonneuse dans la cuisine ?»

Il fallait choisir à Dave Miller (le copain de Sandy, donc, et probablement le mec cool du lycée) deux compagnons parmi ses six potes. Je ne sais pas si le but était de synthétiser des profils représentatifs de la société en 1989 ? Un geek, une punk, un surfeur ... well. Le plus de Maniac Mansion était que ce choix initial allait conditionner le déroulement du jeu, les indices et les cinématiques. La première histoire pixellisée à avoir plusieurs fins différentes selon les personnages. Le but n’était pas de « finir » le jeu. Le but était de le faire avec toutes les combinaisons de personnages. Bernard sait réparer la radio mais Syd sait jouer du piano. Ca ne te parle pas, uh ? Hey le profane, tu peux encore te rattraper en chargeant une émulation gratos trouvable sur le web.