Turbonegro est un groupe à part: il a connu le succès au
bout de presque dix ans d’existence et a encaissé trois destructions
importantes, dont une s’est passée dans la salle d’attente d’un hôpital
psychiatrique à Milan. Personne ne s’en serait relevé. Peau dure et humour
blitzkrieg. Gimme deathpunk, baby ! Sorti sur le label Volcom, Sexual Harassment est un retour à
l’esprit Ass Cobra, l’album punk et
massif de 1996, plus proche que jamais de leur plus grande influence, the
Dictators. Seuls représentants de ce style qu’ils ont appelé le deathpunk,
Turbonegro est toujours dans ce mélange parfait entre Alice Cooper et les
Stooges. Les Stones joués par Motörhead !?
On a rencontré Happy Tom (basse)
et Tony Sylvester (chant) lors du rassemblement annuel du fan-club du groupe à
Hambourg, la Turbojugend. Un club Mickey pour buveurs de bières. Organisés
comme des chapitres de Hells Angels et hurlant que le denim est bien plus rock
que le cuir, ce sont des cohortes de vestes en jean venues du monde entier qui
envahissent la petite salle de Sankt Pauli.
Interview de TRBNGR parue dans Abus Dangereux # 124 Team work avec Guillaume Gwardeath
TRBNGR entre sur scène @ Hambourg
Vous ressemblez au
méchant dans les mauvais films : vous ne mourez jamais. Turbonegro
continue alors que n’importe quel autre groupe aurait classé l’affaire.
Rune Rebellion (qui checke ses mails)
: le puits du Deathpunk n’est pas encore vide.
Happy Tom :
Etre dans Turbonegro est la meilleure chose que nous puissions faire, sans
aucune discussion. On voulait vraiment jouer à nouveau.
La Turbojugend s’est
développée après le split du groupe en 1998 et a connu une deuxième jeunesse
pendant le hiatus avant l’arrivée de Tony. Ca a été une motivation pour revenir
à chaque fois ?
Happy Tom :
Il y a trois ans, tout a explosé et nous ne pensions pas rejouer ensemble un
jour. On était à la fois tristes et soulagés. On tournait en rond chacun de
notre côté et j’ai rencontré Knut (NdR : Schreiner, A.K.A Euroboy, guitar
hero) dans la rue : « Damn mec, j’ai envie de rejouer ». C’était
la motivation première. Alors on s’est dit qu’on allait venir jouer pour le
rassemblement de la Turbojugend, c’était l’été dernier. Selon le plan initial,
on devait inviter plusieurs chanteurs qui feraient chacun 2 ou 3 morceaux. Et
puis Tony est venu passer un week-end à Oslo. On l’avait mis sur une liste de
chanteurs potentiels. Il connaissait si bien le groupe, il comprenait l’esprit.
Après quelques jours, j’étais assis chez moi, sûrement en train de me tripoter
dans l’obscurité et j’ai eu une révélation : « Fuck !
Tony !! ». On a fait une audition, un peu comme dans Fame, et le
reste n’est que postérité. Jouer pour la première fois avec lui devant notre
fan-club, c’était un test. Les fans peuvent être très conservateurs, tu sais.
Ils peuvent devenir très négatifs si un changement survient. Il y a beaucoup de
nostalgie aussi : la plupart des gens voudraient que tout ce qu’on fait
ressemble à Ass Cobra et Apocalypse Dudes. Alors très
honnêtement, on s’attendait au pire. Et le public a adoré. L’ambiance était
dingue. Ce n’est plus le même groupe, il y a beaucoup d’éléments différents
bien sûr, mais ça reste complètement Turbonegro. Les gens l’ont accepté de
façon étonnamment souple.
Tony Sylvester :
J’aimerais vraiment remercier la Turbojugend pour ça. Ca m’a apporté beaucoup
de confiance pour la suite. Ca a du être un des plus gros moments de tension
nerveuse dans ma vie et la réaction instantanée a été extraordinaire. Notre
tactique était de ne pas trop anticiper telle ou telle réaction : monte
sur scène et joue le putain de concert. C’était un sacré test car ce n’était
pas des fans occasionnels, c’était un public pour lequel Turbonegro représente
beaucoup.
Crédit photo @ Micha Fluck |
« Sexual
Harassment » sonne comme un retour aux années Ass Cobra (1996). Très punk.
Happy Tom :
On voulait vraiment faire un disque qui nous ramène aux bases du groupe. C’est
à mon sens un très bon album. On en est tous très contents.
Le chant de Tony est
plus rauque que celui de Hank. Ca a changé votre façon de composer ?
Happy Tom :
Non, à part qu’on ne s’accorde pas exactement pareil. Il n’y a pas que le côté
brut chez Tony, il y a aussi beaucoup de mélodie. Je dirais que c’est un bon
consensus entre ces deux mondes, mais on n’a pas écrit de chansons en jouant
sur ces spécificités.
Tony, tu as fait deux
shows avec le groupe avant de rentrer en studio. Tu aurais préféré jouer
davantage les nouveaux morceaux devant un public avant de les enregistrer ?
Tony Sylvester
: Non, je pense que c’était ok, mais en même temps ça a été le critère
principal quand on a sélectionné les chansons pour le cut final : l’impact
qu’elles pourraient avoir sur le public live. Ca a été assez marrant de jouer
les nouvelles chansons avant que le disque ne sorte car ça a encouragé les
réactions spontanées.
Crédit photo @ Keith Marlowe |
Comment avez-vous
atterri sur le label Volcom ?
Happy Tom :
J’ai dans mes amis d’enfance quelques champions de snowboarding. Ca fait des
années que ces mecs avaient des stickers Volcom sur leur surf. A l’époque,
c’était peu connu. Un nouveau sponsor, petit mais engagé dans ce qu’il
soutenait. Il y avait en parallèle du matériel de surf un minuscule label qui
sortait des 45 tours. C’est alors que toute la partie textile est devenue
gigantesque. Le label est restée minuscule, mais avait des sorties régulières.
C’est devenu un des petits labels les plus solides en restant intègres. On a
toujours été directement connectés aux mondes du skate, du snowboard ou du surf
(NdR : et Bam Margera de Jackass avait fait le lien en choisissant All my friends are dead comme générique
de son émission). Volcom US a toujours été proche de nous. Ils ont même payé
pour un bus de tournée alors qu’on n’était pas signés chez eux. Ils viennent
d’être rachetés par une compagnie française, les propriétaires de Puma, et tout
le monde était inquiet car on pensait que les nouveaux boss se débarrasseraient
de la partie label qui ne fait pas d’argent. En fait, ce doit être des mecs
très rock’n’roll car ils ont confirmé leur envie de développer le label. Bref,
on a enregistré ce disque et on est allés les voir. Je crois qu’ils avaient
toujours espéré signer le groupe donc ça a été une affaire réglée plutôt
rapidement. C’était une démarche très naturelle. On n’avait pas envie d’être un
petit groupe sur un gros label. On est le plus gros groupe signé chez Volcom et
ça nous semble être une bien meilleure situation.