lundi 28 février 2011

Straight Edge


Premier bilan de mon expérience straight edge
Depuis le premier janvier, je me suis lancé dans une expérience personnelle. Ca se rapproche du straight edge, même si l’adoption d’un nom spécifique pour une expérience individuelle me semble fausser le propos.

(crédit photo @ Louise Dehaye)


D’abord, qu’est ce que le « straight edge » les kids ?
L'utilisation de l'appellation Straight Edge vient de l'expression to have the edge, qui veut dire, en anglais, avoir l'avantage. En effet, en ne buvant pas et donc en gardant une clarté d'esprit les straight edge ont l'avantage sur les gens saouls ou drogués qui ne se contrôlent plus. La chanson Straight Edge reprend cette expression, en rajoutant straight, qui devient l'avantage total.
Ce mouvement issu du milieu punk/hardcore est un mode de vie, une liste de choix que chaque Straight Edge prend la responsabilité d'assumer. Ne pas boire, ne pas fumer, ne pas se droguer, ne pas faire l'amour sans sentiments pour conserver une éthique propre aux modes de vies alternatifs. On peut rappeler ici une autre chanson de Minor Threat, Out of Step dont le refrain « I don't smoke, Don't drink, Don't fuck, At least I can fucking think » est souvent pris, à tort, comme les trois piliers fondateurs du Straight Edge. Ian McKaye l'a dit lui même : "This is not a set of rules."



Les gars de Minor Threat étaient mineurs quand ils ont fondé le groupe. Ils ont transformé l’interdiction qui leur était faite en mode de vie. Parfaitement punk. « On n’a légalement pas le droit de boire. Ok, on n’en a pas envie de toute façon. » Pour distinguer les mineurs dans les clubs où se jouaient les concerts, on leur barrait un X au marqueur sur la main pour ne pas qu’ils puissent commander à boire. Ca deviendra le symbole du straight edge.
Ian MacKaye toujours : « Il n’y a rien que je déteste plus qu’entendre les gens utiliser cette merde comme excuse. J’ai entendu trop de fois ‘Oh mec, je suis désolé de ce qui est arrivé hier soir, j’étais trop bourré’. Hey, va te faire foutre mec, ça ne me va pas. »
Je ne suis pas un fan absolu de Minor Threat mais la réflexion me parle. Ou plutôt évoque chez moi quelque chose qui me parle.




Je veux tenter l’expérience dans ce qu’elle a représenté dans ses premiers jours. Garder son indépendance de raisonnement, sa capacité de jugement en toute occasion. Refuser l’addiction des masses. Juste poser la question « pourquoi ? » quand tout le monde considère logique de boire. Juste car c’est ce qui se fait en telle et telle occasion. Indirectement, je comprends la digression qui a poussé à réfléchir sur le fait de payer des taxes au gouvernement et leur utilisation discutable. Mais ça ne va pas plus loin. C’est une expérience que je personnalise et à laquelle je veux redonner son propos originel. Car ce qu’a dit Ian MacKaye dans un cercle restreint, dans un contexte qui lui est propre, dans une réflexion personnelle a été repris de l’autre côté de la rue, puis de l’autre côté de la ville, de l’autre côté du pays et enfin de l’autre côté du monde. Et le propos qui était « pense par toi-même » est devenu « tu dois suivre telle et telle règle si tu veux être straight edge ». Une ironie certaine.
Aujourd'hui, en plus des trois principes de base, la majorité des straight edges y ajoute le véganisme.
Je n’associe pas cela dans mon projet pour plusieurs raisons. D’abord car je n’ai jamais considéré les causes Don Quichotte, qui se ruent sur plusieurs fronts minoritaires à la fois. Perso, j’apprécie la verticalité dans ce genre de réflexion, une certaine cohérence dans le package, et selon moi le veganisme n’a rien à faire dans le truc. C’est une cause distincte et parallèle. Ce n’est pas dans ma disposition d’esprit.
Ca rejoint aussi le fait que j’accepte mal qu’un engagement personnel soit accompagné de prosélytisme. A vrai dire, quand je dis que je veux vivre cette expérience seul, je devrais dire « isolé ». La doctrine actuelle a quelque chose de fascisant, moralisateur et les sites qui parlent du « mouvement » (comment penser librement si tu fais partie d’une communauté avec des règles strictes ?) sont assez pénibles.
Je préfère piquer des citations pour ma situation à d’autres champs d’activité et je citerai donc Joe Namath, légendaire quarterback des NY Jets (foot US) : « If you aren't going all the way, why go at all? »




De façon naturelle, je n’apprécie pas ce qu’on nous impose. Au lycée, tu fumes pour être rebelle, mais comme j’étais le seul de ma classe qui ne fumait pas, je me suis toujours demandé de quel côté de la rébellion je me tenais concrètement.
J’avais déjà mené des réflexions sur l’alcool bon marché pour contenir la masse (drink booze, think loose), grand marronnier de la société occidentale, et me suis un peu ému du fait de boire beaucoup d’alcool social. Machinalement. C’est à dire, sans que l’ambiance soit à la party all night long, enfiler 8 bières pour discuter au calme avec un pote. Rien de radical, j’ai assez partagé d’apéros avec un nombre quasi-recensementaire de gens pour ne pas être taxé d’extrémiste.
Ce qui est assez drôle, justement, c’est que beaucoup de gens ont fait le lien avec le nom de mon blog, « Drink Booze Think Loose ». Ca n’a strictement rien de … euh … ‘militant’. Ce nom était une idée qui m’était venu à la lecture d’un fanzine conspirationniste US. C’est bien plus inquiétant en fait, mais au moins, on ne peut pas me taxer de prosélytisme.
Avec du recul, j’ai l’impression d’être à la croisée de pas mal de méprises hypothétiques. Sans le savoir, j’avais appelé un groupe « Black Sheep ». Ce qui nous caractérisait plutôt bien, mais si on est vicieux, ça fait référence à la pochette d'Out of Step (ci-dessus). J’ai sorti un EP en 2008, qui avait un gros X sur la pochette (ci-dessous). Sur ce disque se trouvait aussi la chanson « Drink Booze, Think Loose » (oui j'utilise beaucoup cette phrase, ça va) !! Je m’aperçois que, hors de son contexte, tous ces trucs peuvent être mal interprétés. Genre je suis un extrémiste. En fait, ce serait une multiméprise grossière.




Il faut chasser le côté « faut rigoler, mec ». Il faut pas mal d’humour pour continuer à avoir une discussion dans un club à 3h du mat’ quand t’es au coca. Et j’avoue que le truc qui m’a fait le plus marrer dans mes « recherches », ce sont les bent edge. L'exact opposé, donc. J’ai vécu en Irlande du Nord et c’est le genre d’humour que je comprends parfaitement. Je veux dire, après tout, comme disait Namath, si tu fais un truc, fais le à fond mec.
Le problème aussi, c’est qu’il faut bien mettre un terme sur l’expérience. Straight edge paraît adapté vu que ça colle au propos originel de Ian MacKaye, mais c’est un terme générique qui draine dans son sillage pas mal de conneries. Et pas mal de gens qui ont leur propre vision du « straight edge ». C'est une expérience personnelle, et donc peu soumise à la vindicte populaire. Etrange comment les gens ont tous leur avis sur comment mener une démarche très personnelle. A vrai dire, si on ne m’en parlait pas tout le temps, je n’en parlerais pas. Bien sûr, il y a ceux qui ne comprennent pas et qui voient ça comme de la désocialisation ou une forme d’impolitesse. Mais je suis étonné du nombre de gens pour qui ce n’est pas assez straight edge. Perso, les straight edge qui mélangent à leur engagement vegan, anti-machin et pro-truc... ça ne me parle pas trop. Et si en 1988, un danois obscur avait aussi statué qu’il fallait ne pas apprendre à conduire? Je vais peut-être traiter ça à l’ironie et créer une nouvelle branche où les straight-edges seront tenus de jouer à NBA jam pendant leur réunion.

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